LES FETES SAISONNIERES Samhain le portail de la saison sombre

La nuit du 31 octobre au 1er novembre correspond à la fête de Samhain, ou Samain (prononcez Sao-ouinn si vous ne voulez pas vous ridiculiser en présence de gaélophones, même si, pour une raison incompréhensible et peut-être même malveillante, la transcription phonétique du gaélique n’a absolument RIEN à voir avec la manière dont les mots sont prononcés). 

Samhain est probablement  la plus importante et la plus singulière des fêtes saisonnières celtiques. Elle était célébrée en Gaule sous le nom de Samonios.

Si on observe une représentation de la Roue de l’Année, on peut constater que les quatre fêtes « mineures », celles des solstices et des équinoxes, forment une croix sur l’axe vertical. Ce motif stable reflète l’énergie spécifique des évènements cosmiques concernés, c’est-à-dire un équilibre momentané entre la lumière et l’obscurité : parité ou disparité complètes, pendant un temps rien ne bouge.

 

Les quatre fêtes majeures sont d’une autre nature, elles correspondent davantage aux phases lunaires, et viennent s’insérer entre les solstices et les équinoxes. Dans le cas de Samhain et de Beltaine en particulier,  on se trouve sur des sortes de « failles », où l’ajustement traditionnel des mondes, le monde humain visible et le monde invisible des esprits et des créatures féériques, n’est plus tout à fait étanche. C’est la raison pour laquelle les réjouissances qui accompagnent ces fêtes s’accompagnent d’émotions mitigées ….

 
 

Samhain semble avoir des origines très anciennes, antérieures même à l’arrivée des Celtes en Irlande il y a 2500 ans, car des traces de lieux cérémoniels remontent jusqu’à 5000 avant notre ère. Le sens littéral de Samhain est « fin de l’été », c’est-à-dire, étant donné que les Celtes n’identifiaient que deux saisons, l’entrée dans la saison sombre, qui se terminera à Beltaine,  au début mai. En Irlande, le terme Samhain signifie aussi simplement « novembre ».

Avec Samhain on parle aussi de la « troisième moisson » : c’est l’époque où tout ce qui pouvait être récolté a été engrangé, la terre ne produit pratiquement plus rien et il va falloir traverser l’hiver avec les réserves qui ont pu être constituées.

Les préparatifs de l’hiver consistaient donc à assurer la conservation des récoltes et à rassembler et rentrer le bétail, dont une partie allait être abattue. Sur le plan social, on faisait aussi de l’ordre en réglant les affaires les plus importantes, y compris l’intronisation de nouveaux rois, en veillant à l’acquittement des dettes et à la punition des crimes les plus graves.

 

Le mouvement énergétique de l’automne et de l’hiver est celui de la conservation, les ressources vont rester à l’intérieur, protégées et nourries en vue de leur régénération. Il est donc important, sur tous les plans, de mettre de l’ordre pour ne garder que ce qui a de la valeur et de se débarrasser de ce qui n’est plus utile …. ou ne l’a jamais été…

 

Samhain est un moment de transition, une sorte de vide entre deux mouvements, un temps suspendu, une ouverture …. On dit qu’à cette période, le voile qui sépare les mondes est extrêmement ténu …La date de la fête de Samhain est théoriquement celle de la 11e nouvelle lune de l’année, mais, comme je l’ai mentionné précédemment, elle est généralement fixée à la nuit entre le 31 octobre et le 1er novembre. Il y a en réalité Trois Nuits de Samhain, les trois dernières du mois d’octobre, pendant lesquelles les morts vont pouvoir rendre visite aux vivants, et les vivants communiquer avec leurs morts. Ces échanges donnent lieu à de nombreux rituels, notamment parce qu’ils ne sont pas exempts de dangers : les chers défunts retrouvent brièvement leurs familles, mais d’autre créatures moins bienveillantes peuvent également se glisser entre les pans du voile.

 

Les feux

Le feu joue un rôle essentiel dans toutes les fêtes saisonnières, mais il a une importance particulière à ce moment de l’année, en raison de la venue de l’obscurité.

Pendant la saison à venir, le feu va être le protecteur de la vie, et lors de Samhain il est célébré de plusieurs manières.

L’historien irlandais du 17e siècle Geoffrey Keating, rapporte que tous les foyers devaient être éteints au début de la fête. Cette extinction des feux, au sens littéral, se faisait pour deux raisons : la première pour symboliser la mort, très présente à cette époque de l’année, et la seconde afin de ne pas attirer les mauvais esprits en goguette à l’intérieur des maisons.

Les druides allumaient ensuite de grands feux symbolisant le soleil, l’espoir de la renaissance, et seuls les brandons provenant de ces feux pouvaient être utilisés pour  rallumer les foyers de chaque maisonnée, afin de protéger les habitants jusqu’au retour de la belle saison. Les cendres des feux de Samhain étaient ensuite répandues dans les champs pour protéger les futures récoltes.

 Il semble d’ailleurs que le terme anglais « bonfire » (feu de joie) provienne de « bone-fire » (feu des os) car les os des animaux sacrifiés lors de la fête étaient jetés dans ces feux cérémoniels.

 

Les lanternes

On associe aujourd’hui Samhain à Halloween et à ses citrouilles, et la filiation est réelle. Cependant, Halloween et les citrouilles n’ont fait leur apparition que dans le Nouveau Monde, lors des fêtes organisées par les immigrants irlandais arrivés aux Etats-Unis entre 1845 et 1850 au moment de la grande famine. En Europe, les lanternes (nettement plus terrifiantes) étaient creusées dans de gros navets ou même des pommes de terre.

Cette tradition, Jack-o’-Lantern en anglais, a son origine dans un conte irlandais dont le personnage principal, Stingy Jack (Jack l’avare) réussit à tromper le diable à trois reprises.

L’HISTOIRE DE  JACK-O’-LANTERN 

(Jack à la lanterne) tradition irlandaise

On raconte qu’un homme nommé Jack avait invité le diable à boire un verre dans son pub préféré. Au moment de partir, Jack n’avait pas envie de payer les consommations, et il conclut un marché avec le diable : ce dernier se changerait en pièce de monnaie, avec laquelle Jack pourrait payer les boissons. En retour, Jack promit de lui céder son âme. 

Le diable tint parole et se changea en pièce de monnaie, mais Jack était rusé : il glissa la pièce dans sa bourse, dans laquelle se trouvait aussi une petite croix, qui empêcha le diable de redevenir lui-même. Il dut alors conclure un autre marché avec Jack : pour retrouver sa liberté il repousserait d’une dizaine d’années ses prétentions sur l’âme de Jack.

 Dix ans passèrent, et le diable revint alors que Jack marchait le long d’une route dans la campagne. Jack dit au diable qu’il avait un dernier souhait : manger une pomme, son fruit préféré, avant de quitter cette terre. Jack convainquit le diable de grimper dans un pommier au bord de la route et de cueillir pour lui la plus belle des pommes, qui se trouvait au sommet de l’arbre. Une fois que le diable fut dans les branches, Jack traça toute une série de croix sur le tronc du pommier, de sorte que le diable fut incapable de redescendre pour emporter l’âme de Jack. Pour être libéré, le diable dut accepter de renoncer à l’âme de Jack, même après sa mort.

Jack reprit le cours de sa vie, devint un vieil homme et finit par mourir, mais il rencontra alors un gros problème. Pendant toute sa vie, il avait été un buveur, un menteur et un tricheur, et ne pouvait donc en aucun cas entrer au paradis. Par ailleurs, le diable avait renoncé à son âme, ce qui lui fermait aussi définitivement les portes de l’enfer. Jack n’avait plus aucun endroit où aller. Le diable tira un charbon ardent de l’enfer, le remit à Jack et lui ordonna de s’en aller … Jack plaça le charbon ardent dans le navet qu’il était en train de manger et l’utilisa comme lanterne pour éclairer son chemin.

Depuis ce jour, Jack erre dans la campagne comme l’âme perdue qu’il es.. Les Irlandais le nommèrent Jack-o’-Lantern, Jack à la Lanterne.

Beaucoup de gens croyaient qu’au moment de Halloween des fantômes et des esprits mauvais essaient de revenir dans le monde des hommes. Ils pensaient que Jack le damné était capable de les effrayer et de les éloigner. C’est la raison pour laquelle ils creusaient et sculptaient des betteraves ou des navets,  dans lesquels il plaçaient des bougies afin d’imiter la lanterne de Jack, et les plaçaient sur les rebords des fenêtres pour éloigner les mauvais esprits de leurs maisons.

 Il est intéressant de remarquer que selon la légende, Jack à la Lanterne erre justement dans un entre-deux mondes, qui rappelle le sens principal de la fête de Samhain.

 

Les portes du Sìdh

La porosité entre les mondes au moment de Samhain est une croyance commune à toutes les population celtes, continentales ou insulaires, mais elle est particulièrement vive en Irlande, où le Sìdh (prononcer « chi ») est le monde souterrain des « fées » (Aos Si, prononcer « is chi », signifiant « gens des collines creuses ») et des esprits en tous genres.

 

Les Aos Si se divisent en deux catégories : les êtres de type Seelie, qui sont bénéfiques et lumineux, porteurs de fertilité, et qui se manifestent surtout lors de la fête de Beltaine, et les être de type Unseelie, foncièrement malveillants, qui viennent parmi les humains pour jouer de mauvais tours ou apporter des maladies. Ces êtres sombres hantent la terre et les airs pendant les nuits de Samhain.

 

La tradition irlandaise considère également que le Sìdh est le lieu où se sont réfugiés les Thuatha Dé Danann, le peuple mythique qui occupait l’Irlande avant l’arrivée des Celtes. Or, il est dit qu’à l’époque de Samhain les portes du Sìdh s’ouvrent, laissant ses habitants circuler dans notre monde.

Le Sìdh est l’Autre Monde, auquel appartiennent aussi les esprits des ancêtres et des proches disparus, ce qui donne naissance à des sentiments et à des rituels ambigus : on dépose des offrandes de nourriture et des bougies pour les chers défunts, y compris à l’intérieur des maisons, où ils ont leur place à table, mais on doit aussi se protéger de possibles incursions d’esprits malveillants.

 

« Samain est (…) en effet le moment où les hommes ont accès à l’Autre Monde parce que l’éternité du Sìd pénètre le temps et en suspend le cours. Les messagères des dieux viennent aussi chercher les heureux mortels qu’elles ont élus parce que, précisément, la suspension du temps annihile provisoirement toute différence entre l’Autre Monde et le monde des hommes et fait tomber toutes les barrières. C’est une fête de fermeture de l’année écoulée et d’ouverture de l’année à venir. Le temps de Samain est celui du Sìd brièvement confondu avec celui de l’humanité ».

« Les Fêtes Celtiques » C.-J. Guyonvarc’h et F. Le Roux

 

Déguisement : le Mumming

L’habitude de se travestir pour la fête de Samhain est très ancienne, et combine également deux objectifs. Le premier est de tromper les esprits malveillants en cherchant à leur ressembler. Les costumes anciens étaient faits de peaux d’animaux et de divers végétaux, et les gens se peignaient le visage pour être méconnaissables.

D’un autre côté, pendant cette fête où la mort est très présente, l’impulsion humaine de rire, de danser et de faire des farces est également très puissante, et les déguisements permettaient aussi le chahut et les plaisanteries.

Cette coutume se retrouve dans la plupart des pays d’Europe du nord, où elle se différencie du carnaval, qui est une fête chrétienne.

C’est aussi la raison pour laquelle, pendant la fête moderne de Halloween, les déguisements sont aussi horribles et effrayants que possible. De nos jours, on ne sait plus très bien qui il s’agit d’effrayer, cette mémoire s’est perdue, mais on peut espérer que ces accoutrements font encore leur effet  …

 

 

Souling

Une autre tradition importante de Samhain, qui est à l’origine de la phrase prononcée par les enfants à Halloween pour obtenir des bonbons, « trick or treat » (mauvais sort ou friandise) est le souling.

Lors du souling, des groupes de personnes déguisées passaient de maison en maison et proposaient de chanter pour les défunts de la maisonnée et pour sa prospérité pendant l’année à venir en échange de fruits, de noix, de bière et de petits pains sucrés, les soul-cakes, ou « biscuits de l’âme »

 

L’une des chansons traditionnelles du souling, « Soul-cake » a été reprise par Sting dans son magnifique album On a winter’s night :

 A soul ! A soul ! A soul-cake !
Please good Missis, a soul-cake ! 
An apple, a pear, a plum, or a cherry,
Any good thing to make us all merry.
One for Peter, two for Paul.
Three for Him who made us all.

God bless the master of this house.
The mistress also,
and all the little children
that round your table grow.
Likewise young men and maidens,
your cattle and your store,
and all that dwells within your gates,
we wish you ten times more.

Down into the cellar
and see what you can find,
if the barrels are not empty,
we hope you will prove kind.
We hope you will prove kind,
With your apples and strong beer,
and we’ll come no more a-souling
till this time next year.

 

The lanes are very dirty,
my shoes are very thin,
I’ve got a little pocket
to put a penny in.
if you haven’t got a penny,
a ha’ penny will do.
If you haven’t got a ha’penny,
it’s God bless you.

Une âme ! Une âme ! Un biscuit de l’âme!
S’il vous plaît, ma bonne dame, un biscuit de l’âme!
Une pomme, une poire, une prune ou une cerise.
Quelque chose de bon qui nous rende tous heureux.
Un pour Pierre, deux pour Paul.
Et trois pour celui qui nous a tous créé.

Dieu bénisse le maître de cette maison.
La maîtresse aussi,
et tous les petits enfants
qui grandissent autour de cette table.
Vous aussi jeunes gens et jeunes filles,
votre bétail et votre remise,
et tout ce qui se trouve chez vous,
nous vous en souhaitons dix fois plus.

Descendez dans la cave
et voyez ce que vous y trouverez,
si les tonneaux ne sont pas vides,
nous espérons que vous serez généreux.
Nous espérons que vous serez généreux,
avec vos pommes et votre bière forte,
et nous ne reviendrons pas pour le souling
Avant la même date l’an prochain.

Les rues sont vraiment sales,
et mes chaussures sont trop minces.
j’ai une petite poche
pour y mettre un penny.
Si vous n’avez pas un penny,
un demi-penny ira aussi,
Et si vous n’avez pas un demi-penny,
Alors que Dieu vous bénisse.

 

Et bien sûr, voici une recette classique de soul-cakes  :

SOUL-CAKES
Ingrédients pour 10 biscuits de 8 cm de diamètre :

  • 300g de farine tamisée

  • 120g de beurre ramolli

  • 20g de sucre cristallisé ou de cassonade

  • 70g de raisins secs

  • 2 jaunes d’œufs

  • ½ cuillère à café de levure chimique

  • 1 cuillère à café de quatre-épices

  • ½ cuillère à café de gingembre en poudre

  • 4 cuillères à soupe de lait de vache ou végétal

  • 1 pincée de sel

Préchauffer le four à 180° et tapisser deux plaques de papier sulfurisé.
Fouetter le beurre mou et le sucre dans un grand bol jusqu’à obtention d’une consistance crémeuse. Ajouter les jeunes d’œufs et bien mélanger.

Ajouter la moitié de la farine, la levure, les quatre-épices et le sel, mélanger. Ajouter le lait, puis le reste de la farine.
Enfin, incorporer les raisins secs et mélanger. La pâte doit être assez ferme.
Étaler la pâte sur le plan de travail enfariné sur environ 1 cm d’épaisseur, puis avec un emporte-pièce découper des disques. Piquer les disques avec une fourchette, puis tracer une croix profonde sur la pâte à l’aide d’un couteau ou d’un manche en bois.

Enfourner les biscuits et cuire pendant 15 minutes, en retournant les plaques à mi-cuisson et en appuyant à nouveau sur les croix avec le couteau ou le manche en bois pour qu’elles ne disparaissent pas pendant la cuisson.

 On peut remplacer le lait par du yoghurt ou de la crème aigre, et ajouter des morceaux de pommes ou des cranberries.

 

Le jeu des pommes

 Samhain est aussi un moment où l’on cherche à deviner l’avenir, et le jeu des pommes dans l’eau était souvent proposé pendant les festivités. Ce jeu est très connu : on met des pommes dans un baquet ou un tonneau rempli d’eau. Les joueurs ont les mains attachées derrière le dos et essaient d’attraper les pommes avec les dents. S’ils y parviennent, cela signifie qu’ils se marieront ou bénéficieront d’une bonne fortune dans l’année.

Le fait d’immerger son visage pour mordre les pommes symbolisait une plongée dans l’autre monde pour aller y chercher la connaissance. En effet, dans la tradition celtique les pommes ont un caractère sacré, ce fruit est considéré comme une source de connaissance, de sagesse, et même d’immortalité : le nom d’Avalon, l’île mythique sur laquelle le roi Arthur est endormi signifie “Ile des Pommiers”. On dit aussi que Merlin enseignait sous les branches d’un pommier.

 

 Un autre jeu consistait à peler une pomme en spirale sans casser la pelure, puis à jeter cette dernière par-dessus son épaule, la forme de la spirale donnait des indications sur les évènements à venir.

Le symbole graphique de Samhain

Parmi les nombreux symboles celtiques, celui de Samhain est particulièrement beau …..

En Irlande et en Ecosse, on peut observer partout les célèbres “Woven Celtic Knots”, ces motifs de noeuds tressés parfois très complexes qu’on retrouve également en Scandinavie.

Globalement, il s’agit bien entendu de la représentation de l’interconnexion de tout le vivant, si présente dans les traditions celtiques et nordiques (oui, oui, le Wyrd …..). Ce qui est intéressant dans le symbole de Samhain est qu’il s’agit d’une version plus complexe du célèbre “Bowen Knot”, qui n’est justement pas un noeud mais un carré comportant des boucles à chaque coin, et qu’on trouve un peu partout (y compris sur les claviers d’ordinateur …) avec aux angles des boucles arrondies ou en forme d’amande.

Le graphisme du symbole de Samhain se caractérise à la fois par sa stabilté (un carré et une croix verticale), et par son aspect “aéré”, qui le différencie des noeuds celtiques classiques très denses et serrés. Cette représentation permet plusieurs niveaux de lecture, car ce qui frappe de prime abord est que les éléments présents dans le dessin ne sont pas “noués”, plutôt superposés, et séparés par des espaces vides. Ceci correspond parfaitement au sens de Samhain : des mondes différents, le notre et celui des esprits et des ancêtres, sont proches, mais séparés par des “espaces”, des voiles, qui permettent, particulièrement à certains moments de l’année, des glissements et des passages dans les interstices, sans toutefois que la stabilité de la structure fondamentale ne soit altérée.

L’autre image qui me vient à l’esprit est celle d’une ancienne serrure en ferronnerie. La raison d’être des serrures est la fermeture …. mais aussi l’ouverture, et donc le mouvement et le passage d’un lieu ou d’un espace à un autre.

Ce symbole est un motif de tatouage fréquemment réalisé pendant les célébrations de Samhain.

 

Autres symboles

D’autres éléments complètent l’arsenal symbolique de Samhain :

 Le balai (de sorcière)

 

Ce balai  n’est pas juste le moyen de transport préféré des sorcières, il symbolise surtout l’action de nettoyage et de purification de l’espace requis à cette époque de l’année. Traditionnellement les balais étaient aussi souvent placés sur les seuils des portes ou devant les fenêtres pour empêcher l’incursion d’esprits malveillants.

Les glands de chêne

Les glands sont des symboles puissants qui évoquent à la fois :

  • le potentiel de croissance

  • la renaissance et la transformation

  • le lien avec les esprits des ancêtres, qui sont fréquemment associés au chêne

  • la force et la résilience

Tous ces éléments sont fortement sollicités au moment de l’entrée dans la saison sombre, pendant laquelle il va falloir rester en vie et se préparer avec confiance au retour de la lumière.

 


Les chrysanthèmes et les tagètes

Ces fleurs sont associées au jour des morts dans de nombreuses cultures, notamment au Mexique.

Les couleurs éclatantes des chrysanthèmes et des tagètes, ainsi que leur parfum puissant, sont réputés pour attirer et guider l’esprit des défunts afin qu’ils trouvent leur chemin jusqu’au lieu de la célébration. Par ailleurs, ces fleurs annuelles symbolisent bien le cycle de vie et de mort célébré lors de Samhain.

La profondeur et l’ombre

A notre époque, hormis préparer une bonne soupe à la courge et des soul-cakes avec un chapeau de sorcière sur la tête (ce qui est déjà un excellent programme), comment pouvons-nous intégrer la tradition de Samhain dans notre vie ?

Je pense que la “faille” de Samhain est une invitation à réfléchir à la notion de profondeur. Les lumières d’automne réveillent les ombres que la lumière de l’été tendait à faire disparaître. Or les ombres créent la profondeur du champ visuel, mais aussi celle de notre perception du monde. Au quotidien nous vivons souvent le monde qui nous entoure comme une “surface”, sur laquelle nous glissons comme des balles de flipper propulsées d’un champignon lumineux à l’autre par nos devoirs, nos besoins, nos désirs …. Il est très facile d’oublier que notre vie n’est pas censée se dérouler sur ce seul plan horizontal, et que l’on croie ou non au monde des esprits (ou de l’Esprit), notre existence se déploie en réalité naturellement dans de multiples directions, car elle est indissolublement liée à tout le vivant qui l’entoure (oui, oui, le Wyrd). Samhain est le moment idéal pour en reprendre conscience ….

Il y a quelque chose caché derrière

II y a quelque chose caché

Dans les pierres, le feu

Dans l'air, dans l'eau claire

Dans les pierres, le feu

Les nombres, dans les ron

des

Et je marche seul sur la lande

Espérant un rayon de là-haut

Mais les pierres de Stonehenge n′ont rien dit

Du tout

Alors malgré nos yeux fermés

Et nos coeurs qui portent un voile

Je voudrais voir des cavaliers

En regardant les étoiles

II y a quelque chose caché derrière

Il y a quelque chose caché

Extraits de “Caché derrière” de Laurent Voulzy paroles d’Alain Souchon

La finesse du voile à Samhain nous le rappelle : nous sommes au centre d’une toile, reliés à de multiples êtres et entités visibles et invisibles. Notre énergie personnelle, notre Qi, est à la fois un medium au sens premier, un moyen de communication avec cet immense réseau vivant, mais aussi un bouclier protecteur contre ce qui, en provenance de ce réseau, peut nous nuire ou nous épuiser, et en être conscient est la première des défenses …. Adapter notre mode de vie au rythme des saisons  est l’une des choses qui permettent de préserver et de renforcer à la fois notre capacité à interagir avec notre environnement et, dans certaines circonstances, à nous en protéger.

 

Parmi ces différents mouvements de l’énergie, celui de l’automne et de l’hiver va vers la profondeur et c’est celui qui nous ancre et nous ressource. C’est la leçon que donnent les arbres, dont le déploiement vers le ciel dépend du système racinaire …

Observer, “voir” les arbres jusque dans leurs aspects souterrains et invisibles, aide énormément à comprendre ce système d’interconnexion, et c’est probablement la raison pour laquelle ils ont une telle importance dans la tradition celtique. L’alphabet sacré des druides, l’Ogham, est aussi appelé “alphabet des arbres”, car chaque lettre porte le symbolisme d’une essence d’arbres particulière.

Le Shirin Yoku, le “bain de forêt” pratiqué au Japon a le même objectif : s’ouvrir à cette énergie profonde et paisible, qui suit si parfaitement le rythme des saisons ….  

 

Un autre cadeau de Samhain peut être un temps de réflexion sur ce que Carl Jung appelait “the Shadow”, notre “ombre”,  ce que nous portons (ou trimbalons) tout au fond de nous, parfois sans même le savoir …

L’ombre est quelque chose d’inférieur, de primitif, d’inadapté et de malencontreux, mais non d’absolument mauvais”.

“Il n’y a pas de lumière sans ombre, et pas de totalité psychique sans imperfection. La vie nécessite pour son épanouissement non pas de la perfection, mais de la plénitude. Sans imperfection il n’y a ni progression, ni ascension”.

“La clarté ne naît pas de ce qu’on imagine le clair, mais de ce qu’on prend conscience de l’obscur”

CG Jung “L’Ame et la Vie

 

Au niveau individel, l’”autre côté du voile” peut aussi être notre part d’ombre, ce que nous ne connaissons pas de nous-mêmes, ou ce que nous connaissons mais refusons d’intégrer, les souffrances du passé, les peurs du présent et de l’avenir, les doutes, la honte, mais aussi les potentiels encore inconnus, les réserves d’énergie et de courage encapsulées dans ces zones obscures de notre être, et qui ne peuvent être libérées que par la volonté consciente de se “relier” à cette profondeur obscure, qui est nous-même, mais aussi quelque chose de plus …..

 

Et pour (en) finir …..

Non, je plaisante …. mais il faut bien reconnaître qu’en soi, Samhain offre peu de motifs de rigolade…

A la fin du mois d’octobre, dans cette phase du cycle des saisons, on entre vraiment dans le dur, car la descente va se poursuivre jusqu’au solstice … c’est le moment où nous pouvons tester notre degré d’acceptation des lois naturelles qui nous gouvernent …. Si vous cochez “J’accueille le mois de novembre le sourire au lèvres, des grosses chaussettes au pieds et une tasse de bouillon à la main” vous avez tout bon.

 

Cette partie de l’année offre peu d’occasions de partage communautaire, hormis les rouspétances. Si vous allez chanter “Soul-cake” sous les fenêtres de vos voisins, vous ne recevrez probablement pas que des pommes et des noix. En réalité, la fête de Halloween, malgré ses aspects commerciaux agaçants, n’est ni “inventée” ni “importée” comme on entend dire souvent. C’est une très ancienne fête locale, qui a beaucoup de sens, alors pouquoi ne pas fêter Samhain?

La seule manière de traverser ces périodes plus sombres est de nous rappeler que nous ne sommes pas seuls à regarder tomber la pluie d’un air morose … pendant des millénaires les habitants du centre et du nord de l’Europe  ont vécu cela à chaque fin d’automne (sans matières imperméables ni chauffage central, en plus). Comme le démontrent à chaque fois les habitants du petit village qui résiste encore et toujours à l’envahisseur, l’anti-dépresseur celtique a toujours été le banquet ….

 

Alors inviter des amis, des proches, plein d’enfants et leur proposer de se déguiser pour que les esprits malins qui ne manqueront pas de s’inviter à la fête ne parviennent pas à les démasquer, et préparer un repas monstrueux en racontant des histoires de fantômes est plutôt une perspective réjouissante….

 

Et donc finalement, on peut souhaiter Joyeuse Samhain !

…. ou pas ……

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LES FETES SAISONNIERES Mabon : L’engrangement