Scintiller sur la toile ...
Mes années d’enseignement ont été précieuses, non seulement pour le partage qu’elles ont représenté, mais aussi pour l’exigence … l’enseignement vous oblige à réfléchir constamment, à remettre en question et à retourner dans tous les sens chaque sujet enseigné : envisager les questions possibles, trouver d’autres manières d’expliquer si la première n’a pas marché, vérifier sans cesse sa propre cohérence… On enseigne avec ce qu’on est et ce qu’on sait, à un moment donné, ce n’est ni parfait ni définitif, on peut se laisser emporter par son enthousiasme, en faire trop, ou pas assez. Bref, j’ai beaucoup aimé …
Il y a presque quarante ans j’ai plongé dans la médecine traditionnelle orientale avec candeur et enthousiasme… j’ai découvert une autre vision du monde, une multitude de nouvelles portes ouvertes, et d’autres dont j’ai fini par comprendre que, malgré leur beauté, elles me resteraient à jamais fermées. Après un certain nombre d’années, la conscience croissante de ne pas appartenir à cette culture a fini par créer en moi de plus en plus fréquemment une sorte de sensation d’illégitimité inconfortable.
Il me semble que ma compréhension des concepts fondamentaux tels que le Yin Yang, le Qi ou les méridiens continue à faire son chemin, grâce à la pratique en cabinet et à l’observation quotidienne, non seulement de mes patients, mais du monde au sens large…. Or si les noms sont chinois, ce qu’ils recouvrent est universel, et j’ai commencé à me demander comment nos ancêtres celtes, germains, scandinaves avaient approché ces mystères.
Au contact de ces sagesses anciennes, l’effet a été immédiat : j’étais chez moi … J’ai même ressenti physiquement une forme d’apaisement, cet univers était le mien, et je pouvais recevoir sans aucun effort le flot paisible de ces connaissances immémoriales, parce qu’elles sont inscrites dans mes os et dans les parties les plus archaïques de mon cerveau. Les symboles me parlent, la sacralité des animaux et des plantes m’est évidente parce qu’ils ont accompagné mes ancêtres pendant des siècles.
Dans la tradition anglo-saxonne, et plus particulièrement galloise, il existe une entité mythique appelée Elin of the Ways, en français Elin des Sentiers. Je ne sais pas s’il s’agit d’une déesse, ou d’un membre du peuple des fées -la tradition celtique est délicieusement brouillonne dans ce domaine- mais elle vit dans la forêt. Elle est légère et agile, vêtue de vert et porte des cornes de cerf. Elle est généralement représentée une lanterne à la main, et accompagnée d’une biche. On dit qu’elle voit tout, que ses yeux sont dans les arbres, mais que nul ne peut la voir, sauf si elle choisit d’apparaître aux voyageurs engagés dans les profondeurs de la forêt pour qu’ils ne s’égarent pas. Le symbole qui lui est fréquemment attaché est d’ailleurs celui du labyrinthe.
Les cornes de cerf relient Elin à une tradition encore plus ancienne, à l’époque ou des hordes de rennes traversaient l’Europe en tous sens. Les rennes sont en effet les seuls cervidés dont les femelles portent des cornes, et parmi elles, ce sont les plus anciennes qui conduisent les migrations sur les voies dont elles gardent la mémoire ….
Les textes de ce blog sont en quelque sorte une invitation à s’aventurer dans la forêt à la suite d’Elin et de sa lanterne ….. Les sentiers sont multiples, et sinueux, et je pense écrire sur le Wyrd et les méridiens, sur la notion de thérapie, sur les runes et les arbres, et sur les autres choses que je découvre au fil de mes pas…..
N’hésitez pas à partager vos pensées et vos propres découvertes, c’est l’idée ….
D’ailleurs si vous suivez Elin il est possible qu’à un moment elle se retourne et, indiquant la forêt, elle vous dise en souriant : omoshiroi ne* ?
Et pour finir, « scintillement.net » se réfère à la sensation que j’éprouve chaque fois que je découvre quelque chose de beau, d’intéressant, quelque chose qui me touche en profondeur … un petit scintillement… qui s’ajoute à d’autres comme un ballet de lucioles (dans les bons jours) … comme des fils de lumière qui ondulent et se relient, qui me relient au monde … qui me relient à vous, et qui, j’espère, vont ainsi aller scintiller encore plus loin….
Nicole Jalil
*intéressant, non ? (en japonais, bien sûr….)